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Grammaire. Première partie.

Table des matières Discours préliminaire. Leçons préliminaires.

 

 

 

Grammaire.
Première partie.
Grammaire.
Seconde partie.
Troisième partie.
De la syntaxe.

 

 

 

|[23]

Grammaire.

Première partie.

 

Chapitre premier.

 

§ 1er Signes du langage d’action.

 

Les premiers moyens qu’eurent les hommes pour se communiquer leurs pensées, furent les gestes, les mouvemens du visage et les accens inarticulés. Le langage qui se forme avec ces signes se nomme langage d’action.

Par les gestes on entend les mouvemens du bras, de la tête, du corps entier, qui s’éloigne ou s’approche d’un objet, et toutes les attitudes que nous prenons suivant les impressions qui passent jusqu’à l’ame.

Le desir, le refus, le dégoût, l’aversion &c. sont exprimés par les mouvemens du bras, de |[24] la tête, et par ceux de tout le corps ; mouvemens plus ou moins vifs, suivant la vivacité avec laquelle nous nous portons vers un objet, ou nous nous en eloignons.

Tous les sentimens de l’ame peuvent être exprimés par les attitudes du corps. Elles peignent d’une manière sensible, l’indifférence, l’incertitude, l’irrésolution, l’attention, la crainte et le desir confondus ensemble le combat des passions tour-à-tour supérieures les unes aux autres, la confiance, la jouissance tranquille et la jouissance inquiète, le plaisir et la douleur, le chagrin et la joie, l’espérance et le désespoir, la haine, l’amour, la colère. &c. …

Mais l’élégance de ce langage est dans les mouvemens du visage, et principalement dans ceux des yeux. Ces mouvemens finissent un tableau que les attitudes n’ont fait que dégrossir : et ils expriment les passions avec toutes les modifications dont elles sont susceptibles.

Ce langage ne parlant qu’aux yeux seroit souvent devenu inutile, si par des cris on n’appeloit pas les regards de ceux a qui on veut faire connoître sa pensée. Ces cris sont les accens de la nature : Ils varient suivant les |[25] sentimens dont nous sommes affectés et on les nomme inarticulés, parce qu’ils se forment dans la bouche sans être frappés ni avec la langue, ni avec les lèvres. Quoique capables de faire une vive impression sur ceux qui les entendent, ils n’expriment cependant nos sentimens que d’une manière imparfaite ; car ils n’en font connoître ni la cause, ni l’objet, ni les modifications ; mais ils invitent à remarquer les gestes et les mouvemens du visage ; et le concours de ces signes achève d’expliquer ce qui n’étoit qu’indiqué par ces accens inarticulés.

 

 

§ 2 Le langage d’action est une suite de la conformation de nos organes.

 

Si vous réfléchissez sur les signes dont se forme le langage d’action, vous reconnoîtrez qu’il est une suite de la conformation de nos organes. car nous n’en [n’]avons pas choisi les premiers signes c’est la nature qui nous les a donnés ; et en nous les donnant elle nous a mis sur la voie pour en imaginer nous mêmes. Nous pourrions par conséquent rendre toutes nos pensées avec des gestes, comme nous les rendons avec des mots, et ce langage seroit formé de signes naturels et de signes |[26] artificiels.

Ce langage qui nous paroît à peine possible a été connu des Romains. Les comédiens qu’on appeloit pantomimes, représentoient des pièces entières sans proférer une seule parole. Comment donc étoient-ils parvenus à former peu à peu ce langage ? Es[t]-ce en imaginant des signes arbitraires ? mais on ne les auroit pas entendus, ou le peuple eût été obligé de faire une étude qu’il n’auroit certainement pas faite. Il falloit donc qu’en partant des signes naturels qui étoient entendus de tout le monde, les pantomimes prissent l’analogie pour guide dans le choix des signes qu’ils avoient besoin d’inventer et les plus habiles étoient ceux qui suivoient cette analogie avec plus de sagacité.

 

 

§ 3 Il faut distinguer deux sortes de langage d’action.

 

Nous pouvons distinguer deux langages d’action ; l’un naturel dont les signes nous sont donnés par la conformation des organes, et l’autre artificiel dont les signes sont donnés par l’analogie. Celui-là est nécessairement très-borné. |[27] Celui-ci peut être assez étendu pour rendre toutes les conceptions de l’esprit humain.

Persuadé que l’homme, lorsqu’il crée les arts, ne fait qu’avancer dans la route que la nature lui a ouverte et faire avec règle, à mesure qu’il avance, ce qu’il faisoit auparavant par une suite de sa conformation, j’ai cru que pour mieux nous assurer des vrais principes des langues, nous devions observer le premier langage qui nous est donné par la conformation de nos organes. Lorsque nous connoîtrons les principes d’après lesquels nous le parlons, nous connoîtrons aussi les principes d’après lesquels nous parlons tout autre langage. En effet plus on étudie l’esprit humain, plus il est facile de se convaincre qu’il n’a qu’une manière de procéder. S’il fait une chose nouvelle, il la fait sur le modèle d’une autre qu’il a faite, il la fait d’après les mêmes règles ; et lorsqu’il perfectionne, c’est moins parce qu’il imagine de nouvelles règles que parce qu’il simplifie celles qu’il connoissoit auparavant. C’est ainsi que le langage d’action |[28] a préparé l’homme au langage des sons articulés et qu’il est passé de l’un à l’autre en continuant de parler d’après les mêmes règles.

 

 

Chapitre II.

Considérations générales sur ?? les Langues et sur leurs progrès.

 

§ 1er L’Homme est conformé pour parler le langage des sons articulés.

 

[Note en marge :] /Nota. Mécanisme de l’organe vocal par Dumarsais et Court de Gebelin/

 

On appelle sons articulés ceux qui sont modifiés par le mouvement de la langue, lorsqu’elle frappe contre le palais ou contre les dents et ceux qui sont modifiés par le mouvement des lèvres, lorsqu’elles frappent l’une contre l’autre. Vous voyez donc que si nous sommes conformés pour parler le langage d’action, nous le sommes également pour parler le langage des sons articulés. Mais ici la nature nous laisse presque tout à |[29] faire. Cependant, elle nous guide encore : c’est d’après son impulsion que nous choisissons les premiers sons articulés, et c’est d’après l’analogie que nous en inventons d’autres à mesure que nous en avons besoin.* [Note en marge :] /*Ex. des [?3] parag./

 

 

§ [2] Comment les langues en proportion avec nos idées, forment un systême qui est calqué sur celui de nos connoissances.

 

Les mots sont les signes de nos idées, il faut donc que le systême des langues soit formé sur celui de nos connoissances. Les langues par conséquent n’ont des mots de différentes espèces que parce que nos idées appartiennent à différentes classes ; et elles n’ont des moyens pour lier les mots que parce que nous ne pensons qu’autant que nous lions nos idées. Vous comprendrez que cela est vrai de toutes les langues qui ont fait quelques progrès.

Les langues sont en proportion avec les idées par conséquent en acquérant de nouvelles connoissances les hommes ont besoin d’une langue plus étendue.

|[30] Mais comment les hommes acquièrent-ils de nouvelles connoissances ? c’est en observant des objets ; c.a.d. en réfléchissant sur eux mêmes et sur tout ce qui a rapport à eux. Qui n’observe rien n’apprend rien.

Or ce sont nos besoins qui nous engagent à faire ces observations. Le laboureur a intérêt de connoître quand il faut labourer, semer, faire la récolte, quels sont les engrais les plus propres à rendre la terre fertile, &c. Il observe donc ; il se corrige des fautes qu’il a faites, et il s’instruit.

Le commerçant observe les différens objets du commerce où il faut porter certaines marchandises, d’où il en faut tirer d’autres, et quels sont pour lui les échanges les plus avantageux.

Ainsi chacun dans son état fait des observations différentes, parce que chacun a des besoins différens. Le commerçant ne s’avise pas de négliger le commerce pour étudier l’agriculture, ni le laboureur de négliger l’agriculture pour étudier le commerce ? Avec une pareille conduite, ils manqueroient bientôt du nécessaire lun et l’autre.

|[31] Chaque condition fait donc un recueil d’observations dont la société jouit. Or comme dans chaque classe de citoyens les observations tendent à se mettre en proportion avec les besoins, le recueil des observations de toutes les classes tend à se mettre en proportion avec les besoins de la société entière.

Chaque classe à mesure qu’elle acquiert des connoissances enrichit /les langues/ des mots qu’elle croit propres à les communiquer. Le systême des langues s’étend donc, et il se met peu à peu en proportion avec celui des idées.

 

 

§ 3 Quelles sont les langues les plus parfaites.

 

D’après ce que nous avons dit dans le paragraphe précédent, vous pouvez juger quelles langues sont plus parfaites, et quelles langues le sont moins.

Les sauvages ont peu de besoins, donc, ils observent peu, donc ils ont peu d’idées. Ils n’ont aucun intérêt d’étudier l’agriculture, le commerce, les arts, les sciences ; donc leurs langues ne sont pas propres à rendre les connoissances que nous avons sur les différens objets. Assez parfaites pour eux, puisqu’elles suffisent à |[32] leurs besoins, elles seroient imparfaites pour nous, parce qu’elles manquent d’expressions pour rendre le plus grand nombre de nos idées. Il faut donc conclure que les langues les plus riches sont celles des peuples qui ont le plus cultivé les arts et les sciences.

 

 

§ 4 Com/m/ent il s’établit une proportion entre les besoins, les connoissances et les langues.

 

Pour vous rendre sensible la proportion qui tend à s’établir entre les besoins, les connoissances et les langues supposons différens cercles. Un fort petit dans lequel nous circonscrirons les besoin[s] des sauvages ; un plus grand contiendra les besoins des peuples pasteurs. un plus grand encore contiendra les besoins des peuples qui commencent à cultiver la terre ; enfin un dernier dont la circonference s’étendra continuellement, et c’est celui où nous renfermerons les besoins des peuples qui créent les arts. Ces cercles croîtront à nos yeux à mesure que la société se formera |[33] de nouveaux besoins.

Nous devons remarquer que les besoins précèdent les connoissances, puisqu’ils nous déterminent à les acquérir. Le cercle des besoins dépasse donc dans les commencemens celui de nos connoissances. Nous devons faire le même raisonnement sur les connoissances. Elles précède[nt] les mots, puisque nous ne faisons des mots que pour exprimer les connoissances que nous avons déjà. Le cercle des connoissances dépasse donc aussi dans les commencemens celui des langues.

Enfin nous remarquerons que tous ces cercles tendent à se confondre avec le plus grand, parce que chez tous les peuples les connoissances tendent à remplir le cercle des besoins et que les langues croissent dans la même proportion.

Parcourons maintenant la surface de la terre. Nous verrons les connoissances augmenter ou diminuer suivant que les besoins sont plus multipliés ou plus bornés. Réduites presque à rien parmi les sauvages, ce sont des plantes informes qui ne peuvent croître dans un sol ingrat où elles manquent de culture. |[34] Au contraire, transplantées dans les sociétés civiles, elles s’élèvent, elles s’étendent, elles se greffent les unes sur les autres, elles se multiplient de toutes sortes de manières, et elles varient leurs fruits à l’infini.

 

 

§ 5 Toutes les langues portent sur les mêmes fondemens.

 

Le systême des idées a partout le même fondement ; il faut donc que le systême des langues soit, pour le fond, le même partout. par conséquent toutes les langues ont des règles communes ; toutes ont des mots de différentes espèces ; toutes ont des signes pour marquer les rapports des mots. cependant les langues sont différentes soit parce qu’elles n’emploient pas les mêmes mots pour rendre les mêmes idées soit parce qu’elles se servent de signes différens pour marquer les mêmes rapports. en français par exemple on dit le livre de Pierre ; en latin liber Petri. Vous voyez que les Romains exprimoient par un changement dans la |[35] terminaison le même rapport que nous exprimons par un mot destiné à cet usage.

 

 

§ 6 Comment les langues se perfectionnent.

 

Les langues ne se perfectionnent qu’autant qu’elles analysent ; aulieu d’offrir à la fois des masses confuses, elles présentent les idées successivement ; elles les distribuent avec ordre, elles en font différentes classes ; elles manient pour ainsi dire les élémens de la pensée, et elles les combinent d’une infinité de manière. C’est à quoi elles reussissent plus ou moins, suivant qu’elles ont des moyens plus ou moins commodes pour séparer les idées, pour les rapprocher, et pour les comparer sous tous les rapports possibles. Vous connoissez tous les chiffres romains et les chiffres arabes et vous pouvez juger par votre expérience combien ces derniers facilitent les calculs. Or les mots sont par rapport à nos idées, ce que sont les chiffres par rapport aux nombres. Une langue seroit donc imparfaite si elle se servoit de signes aussi embarassans que les chiffres romains.

 

|[36]

Chapitre III.

De l’analyse de la période.

 

§ 1er /Composition de la/ Phrase simple /de la/ phrase composée, /de la/ Période.

 

Avant d’entreprendre de décomposer une période, il faut savoir ce que c’est qu’une période et ce qui la forme. Vous savez tous qu’un mot est ordinairement composé de plusieurs syllabes ; qu’une syllabe est ordinairement composée de plusieurs lettres, quelquefois d’une seule ; ainsi la phrase est le composé de plusieurs mots, comme le mot est le composé de plusieurs syllabes. la phrase composée est la réunion de deux phrases. Donnons un exemple de tout cela.

Quand je dis chapeau, je prononce deux sons ; chacun est composé de plusieurs lettres. Quand je dis chapeau est noir, je prononce trois mots liés ; c’est une phrase.

Les mots à la suite les uns des autres ne font pas toujours une phrase. Ainsi si je disois le soleil éclaire la terre et le soleil est un bel astre : je dirois deux phrases ; et quoique je parle du même sujet, cela ne seroit pas une |[37] phrase composée. Mais une phrase composée sera celle-ci : Le soleil qui éclaire la terre, est un bel astre.

La période se compose de la même manière : ce sont plusieurs phrases enchassées les unes dans les autres. ainsi voici ce que c’est qu’une période et la différence qu’il y a de la période à la phrase composée.

On pourroit former plusieurs phrases composées sans faire une période de même que les peintres font ce qu’on appelle une galerie de portraits qui ne forment pas un tableau, ou de même que dans une maison, où il /peut/ y avoir plusieurs individus, sans qu’il y ait plusieurs ou même une seule famille, la famille se composant d’enfans liés au père et à la mère ; de même la période est une sorte de famille où tous les membres font partie du sujet principal.

 

 

§ 2 Ce qu’il faut faire pour décomposer la période.

 

Pour décomposer avec succès une période, il faut d’abord l’écrire, la réduire à autant de phrases simples qu’elle en contient, chercher ensuite les élémens qui entrent dans la composition de chaque phrase. Voici celle que je vous propose pour exemple :

« Qui est donc cet être qui, plus agile que l’aigle, |[38] s’élève dans son vol hardi jusqu’au[x] plus haut des cieux, en mesure la vaste étendue, calcule le mouvement des astres, et semble leur tracer une marche dont il ne leur permet pas de s’écarter ; qui descend ensuite jusque dans le sein de la terre, et pénétrant dans les immenses arsenaux de la nature, l’observe d’un œil curieux, la surprend dans ses secrets, et, riche de ses collections, retourne dans ses foyers, où, rival audacieux de cette mère génératrice de tout, il compose et décompose à son gré ses chefs-d’œuvre, et lui ravit ou partage avec elle l’admiration de ses semblables ? C’est lhomme. »

Cela ne fait qu’un seul tout. Il n’y a là matériellement, ce semble, qu’une proposition et il y a réellement plusieurs phrases, plusieurs propositions ; mais il y en a une surtout, la dominante, c’est à celle-la que tout se rapporte. Il y a là plusieurs phrases de trois sortes, une principale, des phrases incidentes et des phrases subordonnées.

 

 

§ 3 Ce qu’on entend par phrase principale, phrase incidente, phrase subordonnée.

 

La phrase principale est dans une période |[39] comme dans un tableau de famille, le père de cette famille ; comme dans un tableau qui représente une bataille, le heros qui l’a gagnée. Ainsi représentez-vous dans la période la phrase principale, jouant ce rôle principal. Les phrases incidentes sont celles qui viennent là, pour modifier, restreindre ou circonscrire le domaine trop étendu que pourroit avoir ou la qualité qu’on affirme ou le sujet de qui on affirme la qualité. Ce sont des espèces de fossés terminateurs qui empêchent de confondre une propriété avec une autre. Il y a des mots propres et des mots qu’on appelle commun[s]. Les mots propres sont circonscrits, dès qu’ils sont énoncés : les mots communs laisseroient souvent trop de vague dans l’esprit, si des phrases particulières ne venoient leur donner une détermination plus précise et avertir qu’un mot général ne doit pas être pris dans toute son étendue.

La phrase incidente est presque toujours liée à la phrase principale, ou à quelque sujet ou à quelque qualité de la principale, par un petit lien de convention qui n’a dautre fonction que de rattacher cette branche au tronc de l’arbre.

Si Je disois parlant du soleil l’astre est plus grand que la lune, on me demanderoit de quel astre |[40] jentends parler. J’appelle aussitôt une phrase principale /incidente/ à mon secours, c.a.d. une phrase qui venant couper la phrase principale, vienne à côté du nom trop vague, pour le rendre moins étendu, et je dis :

L’astre qui nous éclaire pendant le jour, est plus grand que la lune. Alors plus de vague dans l’esprit. L’astre dont je parle est connu par une propriété qui ne convient qu’à lui seul, et c’est la phrase incidente qui l’a fait connoître. La phrase incidente est ainsi appellée parce qu’elle tombe réellement sur le sujet de phrase principale et on a dû par conséquent lui donner un nom pris dans sa fonction.

Vous voyez que la phrase incidente joue dans la période un rôle moins important que la phrase principale, puisqu’elle ne vient faire autre chose que circonscrire les mots qui, sans elle, seroient beaucoup trop vagues, trop étendus. Les phrases incidentes répandent ordinairement, comme vous voyez, infiniment de clarté dans la période et dans le discours.

La phrase subordonnée n’a absolument |[41] rien de commun avec la phrase incidente, ni pour la forme ni pour le sens. C’est bien une phrase sans doute ; il y a affirmation : mais elle se trouve là pour assigner la place ou le lieu de la scène, que les acteurs ont occupé, ou doivent occuper ; on pourroit la nommer circonstancielle. Elle est là au service de tous, et voilà ce qui lui fait donner le nom de subordonnée.

Exemple : « Après avoir préparé ma leçon, je suis venu à l’Ecole centrale, m’entretenir avec mes Elèves des matières sur lesquelles j’avois médité. »

Après avoir préparé ma leçon, est la phrase subordonnée. Il y a affirmation. Si vous voulez examiner cette phrase : j’ai préparé ma leçon, vous verrez qu’elle ne circonscrit rien, qu’elle ne détermine rien. Elle annonce seulement une action après laquelle s’en est fait une autre, sur laquelle se porte toute l’attention. On peut absolument se passer d’une phrase subordonnée. On ne peut se passer sans tomber dans le vague, d’une incidente. Mais la phrase principale est comme la clef de la voûte. Rien /ne/ seroit compris sans elle, et l’esprit resteroit dans une sorte de curiosité inquiétante. On ne peut donc jamais omettre cette phrase.

Voilà la 1ère différence qui se trouve entre ces trois phrases.

La phrase subordonnée est utile.

La phrase incidente est nécessaire.

La phrase principale est indispensable.

 

|[42]

§ 4 La Période ci-dessus réduite à ses plus simples élémens.

 

Avant d’entreprendre la décomposition de la période, il faut observer que toute proposition étant l’expression d’un jugement doit être composée de trois mots, en sorte que deux soient les signes de deux idées que l’on compare et que le 3e soit le signe de l’opération de l’esprit, lorsque nous jugeons du rapport de ces deux idées. Si je dis : le soleil est lumineux, je fais une proposition. Le premier mot qu’on nomme sujet, et le second qu’on nomme attribut, sont les signes de deux idées que je compare, le 3e est le signe de l’opération de l’esprit qui juge du rapport entre soleil et lumineux. Ce mot est ce qu’on appelle verbe. Toute proposition est donc composée d’un sujet, d’un verbe et d’un attribut. Si la phrase est active elle /de plus/ a un objet d’action comme nous allons le voir dans la décomposition de notre période.

 

 

   1

   2

 

 1

 

Quel

est

cet

être.

 

   1

   2

 3

 

Cet

être

élève

soi

 

 

   1

   2

 

               3

Cet

être

mesure

la vaste étendue

Cet

être

calcule

les mouvemens des astres

Cet

être

semble

traçant une marche

Cet

être

permet

d’écarter soi

|[43]

Cet

 

être

 

descend

 

soi

Cet

être

observe

la nature

Cet

être

surprend

la nature &c.

Il est facile de voir ?? /dans les exemples/ comment la vertu qui se trouve dans la qualité active se porte sur l’objet d’action. Il reste à exprimer la manière dont cette force active y passe, c’est à la préposition à l’exprimer, comme dans cet exemple

          1

 

 1       2

3       4

 5

cet être élève soi dans son vol hardi. ainsi il n’y a dans la phrase la plus longue que ces élémens-ci : Le sujet, l’action (ou ce que nous avons nommé l’attribut et le verbe), l’objet d’action, ensuite la manière dont l’action se fait, le but, le terme, et enfin toutes les circonstances. une fois que tout cela est connu, il n’y a plus de difficultés. Il faut ?? /maintenant/ ajouter le caractère particulier et distinctif de chaque mot et nous trouverons alors dans cette analyse grammaticale, toutes les toutes les parties connues sous le nom de parties du discours.

Analysons la 1ère Phrase de notre période « Quel est /donc/ cet être /qui/ plus agile que l’aigle, sélève d’un vol hardi, jusques au plus haut des cieux, et en mesure la vaste étendue, calcule le mouvement des astres ? &c. »

Quel est un mot éliptique formé de la racine interrogative que et du pronom personnel il, dont le résultat est appellé pronom relatif adjectif et dans ce cas-ci, interrogatif.

|[44] Est, 3e personne du singulier du verbe être ?? /et/ présent absolu. ce verbe est le mot-lien de toute proposition. Il sert à affirmer la qualité du sujet dont celle-ci est la modification.

Donc, mot de liaison, non entre les mots comme le mot-lien, mais entre les parties d’une période ou d’une phrase composée, connu sous la dénomination de conjonction.

Cet article démonstratif et non pronom comme l’appelle Wailly, mot qui sert à tirer un objet quelconque de sa trop grande généralité et qui le met en quelque sorte sous les yeux de l’esprit et même quelquefois sous les yeux du corps.

Etre, mot abstrait, nom générique de tout ce qui existe, quand on ne le considère seulement que sous le simple rapport de l’existence, nom que nous pouvons appeller nom de substance parce qu’il est sous des qualités, et par conséquent nom substantif.

Qui mot de liaison, comme la conjonction, parce que comme elle, il /sert/ à lier plutôt des Phrases que des mots que nous pouvons donc appeller mot conjonctif ; mot qui rapporte au sujet qui précède, la détermination qui |[45] suit et dont ce mot est le sujet, mot qui remet sous les yeux le sujet qu’il remplace et qu’il seroit désagréable de nommer deux fois : deux fonctions qui donnent à ce mot deux dénominations relatives à ses rôles ; celle de pronom parce qu’il tient la place d’un nom ; celle d’article démonstratif parce qu’il détermine ou plutôt parce qu’il précise la signification trop étendue du nom qui précède. ce sera donc pour nous un pronom tout à la fois conjonctif, relatif et démonstratif.

Plus, ce mot sera une modification de la qualité qui va suivre, comparée dans deux individus.

Agile, qualité modificative du sujet déjà énoncé.

Que, mot qu’on appeloit que de comparaison et que nous devons rappeller à la classe particulière qui est celle des conjonctions, parce que partout où il se trouve, il y a une phrase suivante élipsée : c’est comme si on disoit : cet être est agile plus, aigle est agile moins.

Le. Il est par sa nature article indicatif et devient démonstratif quand il est suivi d’un pronom conjonctif qui vient circonscrire son étendue comme « l’homme qui vous parle, se souhaite rien tant que de vous être utile. »

Aigle nom substantif S.

Se écrit avec un S, tient la place du sujet. |[46] Ainsi c’est le sujet qui agit sur soi même : c’est donc un pronom personnel. peut être vaudroit-il mieux l’appeller pronom réfléchi pour marquer que le sujet agit sur lui même et devient l’objet de sa propre action.

Elève, qualité mot-lien. En effet on trouve en lui un double mot, le mot-lien et une qualité.

Dans préposition.

Son pronom personnel adjectif.

Vol, nom substantif abstrait.

Hardi, qualité commune, liée à un nom de substance.

Jusques, mot éliptique, composé d’une qualité et d’une conjonction.

Haut qualité commune, mais aussi mot éliptique. Il y a de sousentendu le mot-lien.

Des mot éliptique composé de la préposition de et de l’article indicatif le. ainsi des sera toujours pour nous employé pour de les, ce que les grecs et les latins exprimoient par une terminaison particulière et on appeloit cette terminaison génitif.

|[47] Cieux, nom propre d’un objet connu et nom d’une substance.

Mesure mot-lien et qualité.

Surement. mot éliptique tenant la place d’une préposition d’un sujet et d’une qualité ; c’est comme sil y avoit d’une manière sure.

Les autres mots étant de la classe de ceux-ci, il seroit superflu de continuer plus longtemps cette analyse.

L’analyse logique de cette période nous donneroit, non des mots, mais des propositions principale[s], incidentes et subordonnées. ?? Mais cet examen nous meneroit trop loin. D’ailleurs je traiterai de chacune de ces propositions dans ma 3e partie.

Qu’avons-nous donc découvert dans notre période dans l’analyse grammaticale que nous en avons faite ? des mots qui sont, chacun, un composé de petits caractères, signes d’objets, ou des qualités de ces objets. Ces mots ont une valeur relative, leur forme varie suivant les fonctions qu’ils remplissent dans le tableau de nos idées et suivant le caractère de ceux avec lesquels ils sont liés. Nous /allons/ traiterons dans la seconde partie des mots pris individuellement.

 

fin de la 1ère Partie